Une fois n’est pas coutume. Parlons du cinéma qui n’a pas vu le jour dans nos salles en France, du cinéma étranger qui se meurt parce qu’il n’est pas aussi bien médiatisé que les blockbusters hollywoodiens, du cinéma de l’ombre parce qu’il aborde un thème pas vraiment tout public, et du cinéma qui mérite quand même toute l’attention qu’un geek et autre fan d’oeuvre fantastique voudra bien lui porter. Parce que Le Territoire des Ombres, c’est un peu tout ça à la fois. Un cinéma bien caché et qui ne mérite pas de l’être.
Ce film n’est pas tout jeune. Il date de 2009 (sorti en 2010). Mais le temps qu’il émerge du marasme culturel, qu’il franchisse les problématiques de la crise européenne, qu’il soit doublé et distribué en France sur un format galette, je n’en avais pas entendu parler avant ce mois-ci. Ce petit bijou (oups, j’ai déjà dit ce que j’en pensais) nous vient d’Espagne. C’est un film fantastique qui s’inspire de l’oeuvre de Howard Phillips Lovecraft. Et… Il fait chier sa mère d’être en deux parties avec la deuxième qui ne sort sur le même format qu’en septembre !!!!! Ouais, parce que bon… Je le dis pas souvent, alors prenez des photos, ce film est bon !
Au départ, je craignais, à juste titre, de tomber sur un nanar. Mais il y a plusieurs éléments qui ressortent d’un visionnage d’un tel film. Déjà, et non des moindres, je ne connais aucune tête, aucun acteur de ce film. Et je me disais que ça finissait par jouer sur la qualité d’un film que d’y voir une tête connue à laquelle tant de rôles différents sont déjà associés. Les acteurs sont peut-être des stars en Espagne, mais pour moi ce sont d’illustres inconnus. Et mine de rien, ça donne un coup de frais. Et même un coup de fouet, car ça me rappelle, au cas où j’aurai oublié (mais ce n’est pas le cas ! ) que ce n’est pas l’acteur qui fait le film, contrairement à la soupe est-américaine qu’on essaie de nous faire avaler à longueur de temps. Et même en France, ça en prend le chemin. Quand on nous vend un film « avec », c’est quand même bien parce que c’est mieux que « sans ».
Second élément d’importance, c’est pas bidon. Mais ça rejoint un peu la crainte du nanar. Ce n’est pas parce que ce film puise ses références culturelles dans le monde noir et désespéré de Lovecraft rempli de monstruosité que c’est un prétexte à nous dérouler le schéma classique du film d’horreur avec des créatures indicibles qui hantent les placards et dévorent les visiteurs. Oh non, pas du tout. On est même plus proche du film fantastique à tendance horreur que dans le film d’horreur pur et dur. Ce film n’est le prétexte à rien, sinon l’ambition de nous raconter une histoire qui n’a rien de simple ni même de simpliste.
Troisième élément d’importance, y’a des moyens. Ben oui, on se tourne toujours vers les sociétés d’effets spéciaux à l’américaine (ou canadienne) auprès desquelles on dépense des millions de dollars pour faire trois boum numériques sur 2 plans de 10 secondes, et bien Le Territoire des Ombres ne se moque pas de son public. On est bien dans une oeuvre fantastique, y’a donc des choses extraordinaires à nous montrer, et c’est plutôt bien fait. Les décors sont crédibles, et les effets numériques n’ont pas été fait sur 3DS Max. Bref, c’est de la qualité. J’ajoute à cela une réalisation qui même si elle est classique est exemplaire d’efficacité, comme quoi, faire des plans à la mort moi le n’œil qui pompent 20% du budget, c’est pas toujours la meilleure façon de faire les choses.
Pour l’histoire, pitchons un peu : à notre époque, une agence immobilière accuse un retard sur l’estimation d’un bien, une vieille maison. Après avoir envoyé un premier agent, celui-ci n’ayant pas rendu son rapport dans les temps, l’agence en envoie un second. Mais comme le premier, le second disparaît mystérieusement. Le grand patron de l’agence fait appel à un privé un peu particulier qu’il envoie sur place pour étouffer l’affaire. Car en réalité, aucun agent immobilier n’aurait dû se rendre sur place. Le privé se voit conter, par la collaboratrice du grand patron, l’histoire de cette maison, une histoire un peu rocambolesque dont le récit occupe la presque totalité de ce premier film. A priori, le second raconte plutôt ce qui va se passer dans le présent, mais déjà, ce qui précède à de quoi tenir en haleine.
Attention toutefois. Le Territoire des Ombres n’est pas un chef d’oeuvre. J’ai parlé d’un bon film. Ça veut dire qu’il pourrait être meilleur. Si je lui concède, outre ce que j’ai cité plus haut, d’indéniables qualités, comme l’ambiance, la photographie, le rendu des personnages, le scénario, il a aussi quelques défauts. L’intrigue met un temps considérable à se poser à un rythme très lent. Ça contribue à l’ambiance, mais dans le même temps, ça crée quelques longueurs. De plus les intentions de certains personnages sont un peu trop faciles à deviner et ça nuit à l’effet de surprise général. Le cinéma « grand public » ne prend généralement pas de gants, ne racontant que le strict essentiel pour rester sur le sensationnel. Il faut reconnaître que le Territoire des Ombres se perd un peu dans sa propre narration. Néanmoins, n’ayant pas vu l’oeuvre intégrale, je reste sur un très bon a priori.
Rendez-vous en septembre pour la suite. En attendant, si vous aimez l’ambiance lovecraftienne et le Mythe de Chtulhu, allez jeter un œil à ce truc. On ne se moque pas de vous 🙂
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Tags: Chtulhu, Howard Phillips Lovecraft, Le Territoire des Ombres
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