Un jour monsieur Smith a décidé de faire du cinéma avec son fils, monsieur Smith junior. Alors, il a écrit une histoire à la con, il est allé voir un réalisateur au fond du trou, monsieur Shyamalan, et ils ont fait After Earth.
Ma chronique pourrait s’arrêter là, car j’ai l’impression d’avoir déjà tout dit. Le pauvre réalisateur M. Night Shyamalan n’a plus autant d’aura qu’il en a eu par le passé. Si c’est un très bon réalisateur, on dirait qu’il a épuisé sa capacité à nous surprendre. Il avait pourtant crevé l’écran avec 6ième sens, étonné avec Incassable, intrigué avec Le village, dérangé avec Signes, enchanté avec La jeune fille de l’eau. Mais quelque chose s’est brisé. Un certain « dernier maître de l’air » a fait de lui un réalisateur « normal » qui peut faire des trucs tout pourri, et depuis, M. Night Shyamalan semble être resté « normal ». Et si son nom, associé à celui de Smith, m’a attiré une fois de plus (dirais-je de trop ? ) dans une salle obscure, je dois dire que je suis déçu. Terriblement déçu.
Attention, spoiler inside.
After Earth, c’est l’histoire d’un père, un héros militaire « sauveur de l’humanité » et de son fils qui essaie de marcher dans ses traces. Ça s’appelle After Earth parce que l’humanité a flingué la planète Terre depuis longtemps (1000 ans d’après le pitch), et qu’elle est allé vivre ailleurs. Dans cet ailleurs, ils ont rencontré une race extra-terrestre hostile qui a confronté les humains à des créatures créées de toute pièce pour les exterminer, des Ursas, dont la capacité à provoquer et sentir la peur (son seul sens avec le toucher a priori), et l’armement biologique embarqué (comprendre, dents, griffes, et muscles) leur permet d’éliminer un nombre considérable d’ennemis. Dans ce futur où les humains sont capables de voyager et de coloniser l’espace, ils se battent au corps à corps avec des armes blanches (c’est pas comme si, en 2013 on ne maîtrisait pas déjà les armes à feu, les lasers et les canons à impulsion électro-magnétique… mais passons)… De fait, les Ursas font des ravages. Jusqu’à ce que Will Smith arrive, ne ressentant plus la peur et, par voie de conséquence, devenant invisible pour les Ursas, ce qui lui procure un sérieux avantage. Bon, seulement, c’est pas le tout d’être un héros, disons qu’à côté, c’est pas un super-père. Du coup, après une entrevue durant laquelle le fiston lui a annoncé qu’il n’avait pas réussi à intégrer le corps des « rangers » dont le papa est la mascotte, le papa l’emmène en voyage « d’agrément » pour essayer de profiter un peu plus de sa présence et se réconcilier avec.
La croisière en question vers une colonie d’entraînement de rangers (dont on ne sait pas pourquoi on les formes à des parsecs de la planète où ils sont sensés être pour défendre la population civile) est aussi le convoi d’un Ursa vivant capturé pour servir à entraîner les recrues. Mais le voyage se passe mal, le vaisseau est endommagé durant le parcours, et pour échapper à la destruction il se « transfère » (sans doute grâce à une technologie de voyage hyperspatial qu’ils auraient pu employer depuis le début pour éviter de naviguer au milieu d’un champ d’astéroïde). Il se retrouve accidentellement en orbite autour de la Terre, planète mise en quarantaine depuis 1000 ans. Toutefois, pas le choix, le vaisseau est trop endommagé pour aller ailleurs et il s’écrase sur Terre. La queue de l’appareil, avec l’Ursa dedans, se détache du reste de l’appareil pendant la chute. Il n’y a que deux survivants du crash, le papa Smith, blessé au point de ne plus pouvoir se déplacer les jambes brisées avec une hémorragie, et le fiston Smith, qui lui est « intact ». Dans les équipements de survie, la balise de détresse est endommagée et la seule autre en possible état de fonctionnement se trouve dans la queue du vaisseau qui s’est écrasée ailleurs. A l’extérieur de la coque, la nature est luxuriante et hostile, l’atmosphère toxique pour l’homme, et 100 km séparent les deux parties du vaisseau.
Je viens de raconter là le premier quart d’heure du film. Tout le reste est cousu de fil blanc et déductible à partir de cette situation de départ. Il n’y a aucune surprise. C’est un film américain, donc happy-end, le gentil gagne, faites jouer la fanfare. La distribution est très réduite (10 noms dans le casting lors du générique de fin), c’est donc un film très intimiste où le seul véritable intérêt de l’histoire c’est la construction de la personnalité du fiston Smith a travers cette épreuve, ce qui reste, somme toute, assez superficiel. Bref, c’est particulièrement insipide. Les effets spéciaux, les décors, l’action et la réalisation sont de très bonne qualité. Mais le sujet est clairement sans intérêt. Un documentaire sur les relations père-fils dans un milieu militaire aurait été tout aussi éloquent.
Bref, ce film est du vent. Et M. Night Shyamalan a définitivement perdu ma confiance en tant qu’auteur (parce qu’il est l’un des scénaristes). Pas en tant que réalisateur, car il a toujours de très bonnes idées pour filmer son histoire. Je le considère comme l’un des réalisateurs les plus talentueux de ces quinze dernières années. Mais tant de talent gâché par aussi peu d’envergure cinématographique, ça me fout la gerbe. Quant à Will Smith, la prochaine fois qu’il pond une histoire pour lui et son fils, j’espère qu’il ne trouvera personne pour la tourner. C’est pas que l’un ou l’autre des acteurs soit mauvais. Au contraire, Jaden Smith est même plutôt bon (et il m’avait singulièrement impressionné dans Karaté Kid). Mais franchement, l’histoire est naze, naze, naze.
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Tags: 6ième sens, Incassable, Jaden Smith, La jeune fille de l'eau, Le village, M. Night Shyamalan, Signes, Will Smith
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